jeudi 4 février 2016

5 livres bien étranges !


Un manuscrit indéchiffrable depuis plus de quatre siècles, un codex médiéval diabolique, une encyclopédie des plus surréalistes, un roman sans le moindre « E », un livre au concept labyrinthique…Partez à la découverte de cinq ouvrages étranges et insolites qui valent le détour.
Le manuscrit de Voynich : L’indéchiffrable
Le « Voynich » comme le surnomment certains est l’un des plus grands mystères de la cryptographie contemporaine. Nul ne sait s’il s’agit d’un herbier, d’un traité d’alchimie ou tout simplement d’une imposture.
Ce codex en vélin de 234 pages doit son nom à Wilfrid Michael Voynich, un bibliophile newyorkais, qui l’acheta en 1912 à une communauté de Jésuites de Frascati en Italie.
Folio F23r (Herbier)
Ecrit dans une langue inconnue, il est richement illustré par d’étranges dessins représentant un monde végétal psychédélique, des symboles astrologiques, des femmes nues nageant dans un réseau de tubes et bien d’autres bizarreries alimentant les théories les plus farfelues quant à son origine, son contenu et le but recherché par son auteur.
Folio f65r1 (Cosmologie)
Sa datation au carbone 14 par une équipe de l’Université de l’Arizona situe sa fabrication entre 1404 et 1438.
En janvier 2014, le linguiste britannique Stephen Bax prétend avoir décrypté 14 lettres. Une découverte intéressante mais qui mérite des approfondissements.
Le fait qu’aucun cryptologue ni linguiste, n’ait parvenu, à ce jour, à le déchiffrer n’exclut par la possibilité d’un canular. 
Folio f78r (Biologie)
Aujourd’hui conservé dans la bibliothèque des livres rares et manuscrits de l’Université de Yale sous la cote MS408, il est disponible en ligne sur : 
Le codex Gigas : La bible du diable
La bibliothèque nationale de Suède (http://www.kb.se/) recèle en son sein un ouvrage unique et mystérieux : le codex Gigas (du grec Gigas signifiant « géant »). Haut de 97 cm pour un poids de 75 kg, ce codex est considéré comme le plus grand manuscrit médiéval connu à ce jour.
Ecrit au 13ème siècle par un moine bénédictin du monastère de Podlažice en Bohème, il est également connu sous l’appellation de « bible du diable » en référence à une enluminure d’un diable cornu et griffu que l’on peut trouver au folio 290.
Portrait du diable (Folio 290r)
Cette illustration pour le moins insolite pour l’époque alimenta la légende selon laquelle, Herman le reclus, un moine du monastère de Podlažice fut condamné à être emmuré vivant. Pour échapper à cette terrible sentence, il proposa d’écrire le plus grand codex du monde en une seule nuit. Se rendant compte qu’il ne pouvait y parvenir, il implora le secours du diable qui l’aida à achever l’œuvre. Pour le remercier, il ajouta la fameuse enluminure.

Le codex contient plusieurs textes écrits en latin : l’ancien et le nouveau testament, vingt œuvres de Flavius Josèphe, les « Etymologies » d’Isidore de Séville, « L’art de la médecine », « Les chroniques des Bohémiens » de Cosmas de Prague ainsi qu’un calendrier.
Un autre fait troublant à propos de ce livre est la constance de la calligraphie qui ne change pas de la  première à la dernière page. Des études récentes ont estimé que le codex gigas est le fruit du travail d’un seul homme qui aurait œuvré pendant près de 27 années.
Le codex Seraphinianus : L’étrange encyclopédie
Considéré comme le livre le plus étrange au monde, le codex Seraphinianus est un OLNI (Œuvre Littéraire Non Identifiée) qui nous plonge dans un univers déroutant, fantasque, unique…indescriptible ! Les fans de science fiction et de fantaisie ne jurent que par lui. 



Cet ouvrage est une encyclopédie surréaliste imaginée par l’artiste architecte italien Luigi Serafini à la fin des années 70 et publiée pour la première fois en 1981.
Illustré par des dessins surprenants et écrit dans une langue imaginaire inventée par l’auteur, ce codex décrit un monde extraterrestre avec sa faune, sa flore, ses mœurs, ses architectures, ses habitants, ses machines…
On y retrouve des éléments de notre temps mais présentés d’une manière absurde : « des fleurs flottantes, une banane remplie de médicaments, une drôle de voiture couverte de mouches, des vêtements qui auraient choqué même dans les années 1970, un homme avec des patins à roulettes transpercé par un stylo géant et pourvu de plumes à la place de mains, et tant d’autres créatures à jambes humaines rattachées de manière étrange au reste de leur anatomie, tout aussi étrange. » (cit. abebooks.fr)
Malgré son côté irrationnel, le livre forme un ensemble cohérent et très esthétique avec une constance dans sa créativité.
Dans deux pages du livre, Serafini semble laisser une clef pour comprendre son intention,  il s’agit d’un homme allongé dont l’encrier a laissé s’échapper des mots écrits en français : « fille orgiaque surgie et devinée, le premier jour sur la digue de Balbec »…Avis aux amateurs d’énigmes !
La disparition : Le roman sans « E »
La disparition est un roman en lipogramme de 320 pages écrit par Georges Perec en 1968. Ce roman ne comporte pas une seule fois la lettre « e ». Cette prouesse étant à la fois liée à la fréquence de la lettre supprimée et à la longueur du texte écrit.
La « disparition » du « e » est intimement liée à l’histoire du personnage au nom très évocateur : Anton Voyl. Le lecteur est invité à suivre les péripéties des amis d’Anton qui sont à sa recherche dans une trame proche du polar.   
A travers ce roman, Perec parle du drame majeur de son existence qui est la disparition violente et prématurée de ses parents durant la seconde guerre mondiale, son père meurt au combat en 1940 et sa mère est déportée début 1943.
Extrait 
« Anton Voyl n'arrivait pas à dormir. Il alluma. Son Jaz marquait minuit vingt. Il poussa un profond soupir, s'assit dans son lit, s'appuyant sur son polochon. Il prit un roman, il l'ouvrit, il lut; mais il n'y saisissait qu'un imbroglio confus, il butait à tout instant sur un mot dont il ignorait la signification.
Il abandonna son roman sur son lit. Il alla à son lavabo; il mouilla un gant qu'il passa sur son front, sur son cou. […]
Sur l'abattant du vasistas, un animal au thorax indigo, à l'aiguillon safran, ni un cafard, ni un charançon, mais plutôt un artison, s'avançait, traînant un brin d'alfa. Il s'approcha, voulant l'aplatir d'un coup vif, mais l'animal prit son vol, disparaissant dans la nuit avant qu'il ait pu l'assaillir. »
La maison des feuilles : Le livre-labyrinthe de Danielewski
Maître des Cassoni Campana : Thésée et le Minotaure
Après la mort du vieux Zampano, Johnny Errand, récupère son manuscrit qu’il essaye de reconstruire et d’annoter d’une façon très personnelle.
Ce manuscrit est une sorte d’essai académique sur un film, « le Navidson Record », réalisé par le célèbre photoreporter, Will Navidson.
Will qui vient d’emménager avec sa famille dans une maison coloniale en Virginie, décide de filmer leur installation. Tout s’annonce bien, jusqu’au jour où la maison commence à changer de forme et de dimension laissant apparaître des chambres qui mènent vers des dédales labyrinthiques aux proportions irréelles…
La lecture de la maison des feuilles demande un certain entêtement et un sens solide de l’orientation car l’auteur multiplie les niveaux de récit. Il alterne entre l’histoire personnelle de Johnny, les péripéties des Navidson, les commentaires de Zampano sans oublier Pélafina, la mère de Johnny, qui adresse à son fils des lettres depuis un hôpital psychiatrique. Chacun des textes des narrateurs est imprimé dans une police différente.
L’auteur joue aussi avec les genres et les styles, prose et poésie, lettres, chansons, photographies, schémas, bandes dessinées, extraits de magazine, citations authentiques ou imaginées…
Mais la plus remarquable des particularités du roman est sa mise en page : pas une page n’est semblable à une autre. On y trouve des textes imbriqués, certains à l’envers, d’autres en spirale ou formant des cercles concentriques, des pages blanches où figure un seul mot…
Chaque fois la forme du récit semble renvoyer à son contenu : mots en quinconces très perturbants quand Will Navidson se perd dans le labyrinthe de sa maison. Petits mots perdus dans de grandes pages blanches lorsqu’il découvre de vastes chambres sans limite. Seule constante typographique du livre, le mot maison qui apparait toujours en bleu.
La maison des feuilles dont la rédaction a pris 12 ans à son auteur a été décrite par certains critiques comme une « satire de la critique académique » et comme un « roman d’horreur existentialiste ».
Dans un entretien, Mark Z. Danielewski dit à propos de son roman : 

« La maison des feuilles était un livre entièrement tourné sur lui-même, un livre fait d’intériorité. Un livre consumé par l’idée de parenté, et profondément introspectif. Je savais, en écrivant les dernières pages, que j’allais devoir sortir de cette maison. J’avais besoin d’extériorité, de me consacrer au dehors des choses. J’avais d’ailleurs observé que beaucoup de lecteurs, qui avaient aimé «la Maison des feuilles», vivaient dans le roman comme dans une maison dont ils ne pouvaient pas sortir. Plutôt que de s’intéresser au monde extérieur, à la vie tout simplement, ils se passionnaient pour mes héros, Pélafina ou Zampano. J’en étais très heureux bien sûr. Mais j’avais envie de leur dire: «Maintenant, lâchez ce livre, et allez voir ce qui se passe dans la réalité ».


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